Si seulement…

Une goutte tombe sur la surface étale de la fontaine en pierre. Un oiseau chante. C’est un nuage qui se reflète dans l’eau. Une feuille s’envole, tournoie, et moi je te regarde pleurer.

Je sens ta gorge serrée, ton ventre noué. Je n’ai pas besoin de tes mots, tes yeux suffisent. Voilà 10 ans maintenant qu’on ne s’est pas parlé. Dix ans à imaginer la vie que tu avais, les hommes que tu croisais, ceux qui t’avaient fait chavirer le cœur, ceux qui passaient juste une nuit, histoire que tu te rappelles que tu avais un corps, ceux qui te regardaient comme une catin, et ceux pour qui tu étais une pierre précieuse… Ceux-là, tu voulais les garder toujours, mais aucun n’est resté…

Une fleur s’abime en pétales dispersés par le vent. L’un d’eux se colle dans tes cheveux bouclés. Moi, je t’ai toujours trouvée belle. Belle comme un soir d’été humide, après la pluie d’orage. Belle comme une main abandonnée sur une épaule éplorée.

Tes larmes coulent, tu n’en peux plus et je te regarde, comme j’aurais aimé pouvoir le faire chaque heure de chaque jour depuis dix ans. Tu étais partie, tu avais laissé la clé sur la porte. Moi, j’avais le cœur à nu et c’était comme si tu avais marché dessus.

Les histoires les plus belles s’écrivent dans le silence. Tu n’as jamais compris que j’avais toujours été là pour toi. La brise soulève ta jupe fleurie, et les minuscules tâches de rousseur sur tes joues brillent des larmes que tu laisses couler. Une odeur de pomme trop mûre. Je passe ma main sur l’herbe, juste assez haut pour l’effleurer et je souris. Simplement. Je souris, je ne peux pas m’en empêcher. Je viens d’arriver à te dire que tu es et resteras toujours la seule pour moi. Toi, tu as pris ma phrase au vol, tu l’as regardée tourner sans comprendre pendant un long moment. Tu as fini par décider que c’était vrai. Tu réalises le temps perdu à se chercher. Celui, abîmé à force d’usure, à parcourir des draps où tu n’étais pas chez toi.

Un petit chat se pointe, qui minaude et se frotte sur ton mollet. Tu laisses ta main traîner pas loin, et il est là, qui se frotte, c’était prévisible.

Tu me regardes, enfin. Jusque-là tu visais l’horizon, avec tes yeux d’étang brouillé par les algues. Je sais que tu sais.

Tu me prends la main. Il n’y a jamais eu d’autre histoire. Tu as juste mis dix ans à le comprendre.

Je suis patient. Je restais là, tapi dans l’ombre d’histoires courtes, je savais que tu viendrais. On entend les cloches de l’église sonner, ça fait vibrer les pâquerettes tout autour de nous. Tu me regardes et ma main, tu la presses dans la tienne.

Tu m’embrasses. Enfin. La vie peut commencer, d’une autre manière. Une manière que j’aime.

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Parlons d’amour !

It’s been ages since I last wrote something in this blog !

Je vous pose le décor ? Petit spectacle de rue à Saint Genest Lerpt. Une toute petite femme enceinte avec un sourire immense, une chatche d’enfer, un short en jean et un T shirt qui moule son joli ventre. Lui, il arrive avec une barbe de 4-5 jours, un anneau à une oreille. Les deux parlent d’amour. Nous, on est là, à écouter ce spectacle qui semble être simplement un dialogue entre eux, au début. Ça parle d’amour. De ce qui nous échappe, la plupart du temps. Ils redisent comment ça fait, au début. Et pourquoi ne pas tomber en amour avec tous nos voisins ? Qu’à cela ne tienne ! Bien vite, tout le monde se met à la queue leu leu, on forme un cercle, puis un cercle dans le cercle, et nous encourage un troisième larron, jeune et moustachu, un peu le look de Freddy Mercury, qui se balade entre les gens, dans le chemin laissé libre entre les cercles formés par nous, toujours en file. Il est vêtu d’un slip rouge vif flanqué d’une paire d’ailes argentées en tissu synthétique, de chaussures à la romaine qui remontent haut sur les mollets, et il a des gros cœurs roses peints sur le torse, des boucles d’oreilles en forme de cœur… Le gars nous parle d’amour. De ces moments épars où l’amour se balade entre les gens, et de nous à qui il incombe de le faire vivre, enfin !

Après un moment à tourner comme ça, il nous fait nous arrêter. Et près d’une petite centaine de personnes, en cercle, se prennent les mains. On attrape celle du voisin, de la voisine. On ferme les yeux.

Il nous emmène en voyage. Il nous fait revivre un moment d’amour. Un moment où nous avons été amoureux. Alors, je vous le propose : attrapez donc là tout de suite un moment où vous avez été amoureux. Un instant de votre vie, où vous aviez les papillons. Laissez remonter le souvenir… Retrouvez les odeurs de cet instant volé aux ailes du temps. Les bruits, autour de vous. Quelles étaient les sensations, la façon dont le corps était installé, ce que vous pouviez voir… Moi je me suis rappelé un moment précis. J’y étais. Au milieu de cette place, avec tous ces gens qui voyageaient dans leurs souvenirs, j’étais dans les bras de ce chéri dont j’étais amoureuse. Ce n’était pas un moment extraordinaire de notre histoire, juste un moment dont je me souviens, qui était précis et chéri dans ma mémoire. J’ai laissé quelques larmes baigner mon visage, parce que c’était beau, c’était bon de se retrouver dans ce temps suspendu pour quelques secondes.

Où sont les moments d’amour ? Qu’en faisons-nous ? Les laissons-nous partir, ou bien sommes-nous à jamais capables d’en faire une petite suite heureuse et qui se niche joyeusement dans tous les recoins du quotidien ? Ce spectacle, je l’ai trouvé terriblement touchant. Simple et authentique. Bienvenu après ces mois de confinement où les gens ne se touchaient plus, où chacun allait son chemin en faisant un détour pour ne pas être en contact. Retrouvons le sens du contact, de la chaleur humaine. Et déployons l’amour dans toutes ses formes. L’amour amoureux, mais aussi l’amour filial, l’amitié, l’amour qui se vaporise dans une conversation avec des inconnus, celui qui s’infiltre dans un sourire au détour d’une rue, l’amour simple qui se transmet par la voix, le geste, le regard…

 

Le spectacle était de la compagnie Superfluu (https://www.cie-superfluu.com) sur lequel on peut lire cette très belle citation :

“On peut consolider la falaise d’où l’on va sauter, mais pas le vide dans lequel on s’élance.” Eugène Lion.

Et, à tout prendre, Eugène a raison : l’amour c’est un vide que l’on ne pourra jamais consolider… A un moment donné, il faut se lancer !

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Se laisser être fragile…

31 décembre. Dernier jour de l’année. Peut-être le moment rêvé de se poser un peu, de réaliser le chemin parcouru durant les mois qui viennent de s’écouler. Beaucoup laissent entendre que l’année a été « pourrie », « difficile », « abominable »… Des qualificatifs désolés pour dire les moments de doute, de découragement, d’impuissance face à l’épidémie, aux contraintes financières vécues par beaucoup, à tout ce magma d’inquiétudes qui s’est déversé sur des existences jusque-là routinières… C’est un stade que je conçois, mais qu’il faut sans doute dépasser, sous peine d’échouer à lancer 2021. Le fait de rester sur le négatif confine à l’impuissance et à la stagnation, par peur. Peur de ne pas arriver à contrôler, d’échouer, peur de ne pas y arriver et de tomber, surtout.

Mon année a été riche en événement que beaucoup pourraient qualifier de négatifs. Pour autant, ma lecture en est toute différente. J’estime avoir atteint un état de bonheur rarement atteint. Une solitude heureuse qui ne doit rien à l’extérieur, et tout à un travail intérieur que j’ai réalisé au fil des moments que j’avais d’abord qualifiés de « difficiles ».

Notre quotidien sera toujours jalonné, de cette façon, d’événements qu’il nous appartiendra de voir comme des couperets ou des opportunités. Notre vision de ce qui arrive teintera la manière dont nous pourrons grandir, ou pas, au travers de ces moments proposés. Il faut aussi réaliser l’importance énorme de nos pensées, nos mots, nos anticipations et nos désirs sur la survenue des événements de notre vie. Nous appelons, par nos vœux inconscients, une bonne part de ce qui vient à nous. A nous d’être conscients de ce pouvoir, et de formuler consciemment les désirs qui nous porterons demain. C’est le jeu des vœux en ce début d’année qui arrivera dans quelques heures. Soyons précis dans nos demandes, et nourrissons l’espoir qui aidera toutes ces belles choses à fleurir sur le terreau de notre vie.

 

Une conclusion à laquelle je suis arrivée, au terme de ces mois tumultueux que je viens de vivre, c’est l’importance vitale de se rendre vulnérable. En amour, plus qu’ailleurs, il s’agit d’une attitude indispensable pour oser une vraie rencontre authentique. A mes yeux, la vulnérabilité est cette capacité à se tenir debout face à l’autre dans toute notre nudité. Cela signifie que l’on est prêt à se montrer dans toute sa vérité, les défauts comme les qualités, les zones d’ombre comme les endroits lumineux. Cela suppose de connaître déjà ce qui nous anime de l’intérieur, et d’avoir posé le doigt sur ces parties de nous qui nous plaisent moins. Ou, à défaut de les avoir visitées en profondeur, de les accepter.

Se rendre vulnérable, c’est aussi accepter de donner et de recevoir sans attentes. Donner sans attentes, c’est-à-dire sans avoir besoin d’un retour de la part de l’autre, qui choisira ce qu’il souhaite faire du présent, en toute liberté. Recevoir sans attentes, c’est être capable de tendre les mains pour que l’autre y dépose ce qu’il a à donner. Il importe alors, si on n’a pas eu l’habitude de recevoir, d’accepter la fragilité de se sentir, peut-être, redevable. Un sentiment invivable pour certains, en ce qu’il crée comme un devoir de rendre, qu’il donne à l’autre un pouvoir sur nous : celui de reprendre, ou d’utiliser ce qui est donné pour imposer ou contraindre.

En amour, savoir recevoir, c’est se montrer fragile en dépassant ce sentiment de vouloir donner en retour. Accepter le cadeau, et simplement se sentir reconnaissant. Se montrer vulnérable, c’est accepter de l’autre ce qu’il a à donner, sans savoir la forme que cela pourra prendre. Sans chercher à contrôler ce qui arrivera. Une posture d’ouverture et d’accueil qui donne à l’autre la possibilité de se déployer en toute liberté. C’est contraire à ce que beaucoup d’entre nous ont appris : le contrôle est souvent la protection ultime qui nous a été utile, petit, lorsque nous devions nous protéger, nous conformer aux demandes inconscientes qui nous étaient faites.

L’amour demande que cette armure-là tombe, et que le contrôle nous échappe pour accueillir ce qui vient de l’autre de la façon dont l’autre a besoin de le transmettre. Sans vulnérabilité, le contrôle garde la citadelle de l’ego et rien ne circule… Le contrôle empêche la fragilité et éteint l’amour aussi sûrement que l’eau étouffe la flamme. Imaginez seulement une nuit d’amour où l’un arrive nu tandis que l’autre a enfilé une armure en cuir et en métal ! Et l’ego, il a toute sa place, mais en amour, force est de constater que leur coexistence amène rarement l’abandon. Lâcher prise est indispensable pour se rendre fragile, et c’est précisément ce que l’ego fuit par-dessus tout ! La vulnérabilité en amour impose alors que l’ego soit relégué dans un tout petit espace où il ne viendra pas se mettre en travers du chemin et tenter à tout prix de faire respecter ses lois. Se rendre vulnérable, c’est accepter de rester humble…

Pour 2021, je nous invite à accueillir la vulnérabilité qui permet à l’amour de circuler librement. Certains appellent cela se mettre en position de faiblesse. Je trouve plus juste de dire en position de réceptivité. C’est une manière de s’accueillir soi, dans toutes ses dimensions, et d’accueillir ce que l’autre a à donner, quoi que ce soit. Ce n’est qu’à cette condition que l’amour pourra s’épanouir en toute liberté et l’énergie circuler. En 2021, l’amour pourrait bien prendre toute la place, et c’est sans doute ce dont le monde a besoin aujourd’hui, plus que jamais.

 

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Sirsasana ou la résilience en mouvement

Il existe une posture de yoga que j’aime beaucoup. Pour le défi physique qu’elle présente, mais aussi pour la symbolique qu’elle apporte. La posture sur la tête, aussi appelée Sirsasana en sanskrit, est un pied de nez à la gravité, et on l’appelle aussi la posture de la peur. Pourquoi ? Parce qu’une fois qu’on a développé la musculature adéquate pour la réaliser, le plus grand obstacle à sa réalisation réside entre les deux oreilles ! Il s’agit de s’autoriser à monter dans cette posture délicate, et surtout… à tomber ! C’est la raison pour laquelle, lorsque je l’enseignais, j’encourageais les étudiants à apprendre à « rater » le mouvement et à tomber, sans se blesser, au sol.

Je trouve dans cette posture une très belle métaphore de ce que je vis actuellement. L’année 2020 qui s’achève m’a malmenée d’un bout à l’autre. Comme en yoga, la vie m’a poussée à regarder mon existence la tête à l’envers, m’invitant du même mouvement à rester à l’équilibre, quels que soient les événements qui viendraient se manifester. J’ai résisté, lutté, je me suis débattue, je suis passée au travers, j’ai gueulé aussi, j’ai maudit et j’ai aussi accepté. Le divorce, la maladie, le déménagement, le changement de boulot et les deuils, nombreux, l’instabilité émotionnelle et financière, les amis qui tournent le dos et ceux qui entrent dans ma vie. Tout ce bouleversement ramassé sur quelques mois m’a véritablement mis la tête à l’envers. Voici en quelques mots ce que j’ai appris au fil des jours qui ont parfois paru très, très longs…

 

J’ai appris que, peu importent les circonstances, rechercher qui je suis était la plus importante des quêtes.

J’ai appris que l’amour, et lui seul, était ce qui valait la peine d’être conquis, intégré, accepté et accueilli. Que l’amour était en moi, et que je n’avais plus à le rechercher chez les autres : il existe partout et survit à tout, pour peu qu’on sache le voir dans son omniprésence.

J’ai appris que les autres n’étaient que le reflet de qui j’étais et qu’à ce titre, je devais changer mon état intérieur pour voir les changements apparaître chez les autres. L’amour que je me porte n’est pas conditionné par ceux que je côtoie : il en est la manifestation.

J’ai appris qu’il était possible d’être heureux quelles que soient les circonstances qui s’imposaient à moi. Et qu’il ne tenait qu’à moi d’en faire des événements favorables, par ma façon de les accueillir. Car en y pensant bien, une chose arrive et ne peut être vue positivement ou négativement que si l’on se met à la juger comme telle. En l’acceptant comme elle se manifeste, je m’autorise à l’accueillir et à en faire, ultimement, une occasion de grandir et une opportunité.

J’ai appris que le manque de quelqu’un, le désir d’attirer des personnes ou d’en éloigner d’autres, n’étaient que des réactions à la peur. Si je décide de faire venir l’amour et de le cultiver en moi, il n’y a plus cette peur, pas plus que ce besoin d’attirer ou d’éloigner. J’ai cette conviction désormais que toutes les belles choses que j’anticipe pour moi-même arriveront, quoi qu’il arrive, et sans effort, dans la mesure où c’est l’amour qui guide mes actes, et non la peur. Plus besoin de me protéger ou de trépigner en attendant avec impatience que ce que je souhaite plus que tout arrive. Cela va finir par arriver.

J’ai appris que l’intention et le mouvement du cœur entraînent des manifestations incroyables, et qu’il faut impérativement prêter la plus grande attention à ce que l’on pense et ce que l’on dit. Une énergie puissante est contenue dans ces pensées et ces mots, qu’il ne faut pas prendre à la légère. Dire aux personnes que l’on aime qu’on les aime relève presque d’un devoir et d’une liberté que je m’autorise en permanence désormais. Et m’interdire de médire est un objectif indispensable.

J’ai appris qu’il est vital pour moi à présent de prendre mes rêves pour des réalités, et de ne plus laisser le moindre obstacle m’arrêter. Ma vie est décidément trop courte pour que je la passe encore à m’appesantir sur le passé, sur mes erreurs ou mes échecs, ou à vouloir des choses qui ne me correspondent pas. A chaque minute, je reste éblouie par les beautés que je perçois partout et dans toutes les personnes que je croise. Je ne veux plus me concentrer sur le négatif, mais laisser le positif éclairer le chemin.

J’ai appris que les personnes que j’aimais étaient comme des cadeaux que je déballe chaque jour avec bonheur. Et les surprises sont constamment en train d’apparaître, je m’en réjouis jour après jour.

 

Je sais que les difficultés que la vie apporte semblent parfois insurmontables. En réalité, rien de ce qui nous arrive ne dépasse notre capacité à les gérer. La vie est ainsi faite qu’elle nous permet de grandir avec des « présents » que nous pouvons choisir de juger, auxquels nous pouvons résister de toutes nos forces. Nous pouvons aussi choisir de les accueillir comme tels, et d’ouvrir nos bras à l’expérience proposée, pour devenir de meilleures personnes.

Au bout de cette longue année, j’ai un sentiment de gratitude immense pour toutes les personnes que j’ai rencontrées, toutes celles qui m’ont soutenue de manière inconditionnelles, toutes celles qui m’ont enseigné, à leur insu souvent, mais toujours avec amour. Que chacun(e) se sente remercié à la juste mesure de ce qu’il(elle) a donné, qu’il(elle) en soit conscient ou non…

 

En cette fin d’année, je vous souhaite de devenir, chacun d’entre vous, la meilleure version de vous-même. Des personnes aimantes et qui savent s’apporter à elles-mêmes l’amour dont elles ont toujours manifesté le besoin. Cet amour-là, une fois que vous l’avez manifesté pour vous, pourra rayonner bien au-delà de vous et faire de ce monde un bien plus bel endroit pour vivre…

 

Je vous laisse l’adresse d’un site (en anglais…) qui m’a bien aidée à orienter ma barque sur le flot tumultueux de cette année : https://www.iam-love.co/

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