Cachez ce mal que je ne saurais voir !

Judith en a plus qu’assez. Au boulot, déjà, c’est la course folle. Et puis il y a ce collègue avec lequel ça ne passe pas, c’est toujours tendu, sans qu’elle comprenne vraiment pourquoi. Le fait est que, dès qu’elle ouvre la bouche, il s’évertue à lui donner tort ou à lui prouver que ses propos sont idiots. Un peu fatigant. Et puis à la maison, sa fille fait des siennes, semble prendre un malin plaisir à la contredire, à s’opposer. Cette merveilleuse période qu’on appelle l’ado et qui, elle le savait, serait si difficile à vivre. Car après tout, Pénélope a toujours eu beaucoup de caractère : c’était à prévoir. Sans compter que son mari, lui, n’est jamais là. Toujours parti en voyage pour son boulot, un vrai courant d’air. Alors qu’elle rentre de son travail, ce soir-là, elle s’effondre plus qu’elle ne s’assied sur la chaise du salon. La chaise plutôt que le canapé : si elle se risquait à y prendre place, elle a le vague sentiment qu’elle pourrait s’y endormir. C’est à ce moment quelle arrive, sournoise, imprévisible et terriblement bruyante. Cette douleur qui tout-à-coup lui vrille les muscles du bas du dos. Tout est dit ! Elle sait qu’elle ne pourra pas se lever sans éprouver la sensation du poignard dans les lombaires, peut-être même qu’elle ne parviendra pas à se relever seule… Elle prend une grande respiration, et à l’expiration, tente de se détendre. Peine perdue. Pénélope a un examen demain, un truc important en lien avec le bac, elle ne peut pas la laisser tomber, il faut préparer à manger… Et puis son mari doit revenir du Brésil ce soir aussi. Elle sent une nausée puissante monter, et d’impuissance, se met à pleurer…

Ça vous rappelle quelque chose ? Quand le corps se charge tout seul de vous rappeler à l’ordre. L’ordre des choses, celui d’une vie qui devrait vous ressembler, tant il n’y en a qu’une qui pourrait vous correspondre. Et pourtant, ce n’est pas souvent celle que l’on choisit pour soi… On se loge plus volontiers dans celle que les autres ont programmée, de façon inconsciente le plus souvent, ou parfois de manière délibérée, pour nous. On s’est plié, tant bien que mal, dans la petite boîte, subi cette série d’injonctions ou de croyances héritées de l’histoire familiale ou d’un passé qui, à bien y regarder, ne nous appartient pas. Et voilà, un beau jour, le corps se met à crier qu’il n’en peut plus. D’abord par un petit mal de dos, celui qui signifie : stop ! Tu n’en peux plus ! Tu as besoin de repos ! Et puis, sans l’écoute qu’on lui doit, à ce corps tellement intelligent, il va augmenter le niveau de décibels sous forme de maux plus handicapants ou difficiles à guérir, jusqu’à parfois déclencher une maladie chronique. Inutile de se sentir coupable pour autant : il ne s’agit que de messages voilés que l’on peut entendre ou pas. Que l’on est prêt à écouter, ou pas. Il faut cheminer chaque fois, car cela n’est jamais gratuit : le mal a dit… Dans ma pratique du shiatsu, il est souvent surprenant de voir à quel point ces manifestations sont parlantes dans le parcours d’une personne. J’en ai personnellement aussi fait l’expérience souvent. Chaque fois qu’un problème de santé se manifeste, ma question est toujours : « qu’est-ce que mon corps essaie de me dire ? ». Pas pour me culpabiliser, ce qui n’aurait aucun sens. Mais pour simplement décoder le message, qu’il est important que je comprenne, pour pouvoir progresser. Le mal de dos signale une surcharge, une peur, ou un besoin de poser mes bagages et de me reposer. En shiatsu, les maux les plus variés sont, en médecine traditionnelle chinoise, associés à des méridiens, et ces derniers sont liés à des émotions. Ainsi, les problèmes de peau sont liés au poumon, qui peut être affecté par la tristesse. Le foie et les problèmes de vue, par la colère… Etc. Alors au-delà du soin que constitue une séance de shiatsu, j’aime offrir quelques clés à la personne qui le reçoit, et dont elle fera ce qu’elle jugera bon. Lire dans un problème urinaire quelque chose de l’ordre de la peur, dans une angine une incapacité à parler de ce que l’on ressent, ou une impossibilité à être accepté comme on est…

Le corps parle, et on peut choisir de l’ignorer, de soigner le symptôme. Mais, à l’instar de ce que l’hypnose que je suis en train d’apprendre m’enseigne, s’attacher au symptôme en refusant de descendre à la cause racine du mal ne fait que perpétuer un problème. Ce n’est qu’en acceptant d’affronter qui l’on est, et de faire l’effort de comprendre les obstacles qui se répètent dans notre vie, que l’on peut s’offrir une vie plus heureuse. Comme le dirait mon formateur, c’est peut-être 9 jours de mal-être qui vont suivre la prise de conscience douloureuse que l’on s’est saboté, mais c’est 9 jours face à 30, 40, peut-être 50 années passées dans la douleur. Parce qu’on ne s’est pas autorisé à affronter les vieux dragons pour avoir accès à l’or caché dessous… Apprendre à lire dans les maux du corps est donc une attitude que je considère comme sage et pourvoyeuse de bonheur. C’est une boussole sublime pour parvenir, un jour, à vivre libre de ses vieilles croyances, et des choses qui se sont peut-être opposées à notre bonheur, parfois depuis le début…

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Un ange passe…

Le soleil s’invite dans le jardin, et les mots de Grand Corps Malade sur ma page. Je me laisse happer par le flot des événements qui débarquent dans l’existence sans que le temps les arrête. J’ai envie de calme, de repos, de paix. C’est fou comme on se fait envahir par les successions de moments sans toujours savoir calmer cette incessante cascade. Le temps coule entre nos mains jointes, dans le geste dérisoire qui nous pousse à le retenir. Je me dis que cette volonté que nous avons, et qui trop souvent se heurte à des habitudes trop bien ancrées, la maladie vient parfois y mettre bon ordre. Car nous avons quelquefois trop peur de chambouler ce que l’on connaît, et seul, le mal a dit qu’il était temps de s’arrêter. Comme si c’était la seule solution. Il faut alors prendre le message, et si ce qui nous tombe dessus nous plaque dans le quotidien d’une chambre, d’une maison ou d’un appartement, c’est que le repos nécessaire vient de loin, et qu’il a attendu longtemps pour s’inviter chez nous… Il est possible de faire autrement. De ralentir sciemment, même si l’exercice est celui du funambule sur son fil, qui requiert concentration et volonté, audace et courage, et puis aussi un poil d’inconscience. Les miracle morning sont là pour ça, mais eux-mêmes sont par moment trop lourds à suivre, matin après matin. Il faudrait simplement s’autoriser à s’agenouiller devant une fourmi qui s’active, prendre vingt minutes pour regarder la mésange qui fait son nid, se promener sans jeter l’œil sur la montre… Cela paraît si simple, et c’est pourtant un véritable travail, une bataille sans merci contre la course du temps qui s’affole. Aux armes, citoyens ! Battez-vous pour préserver les moments suspendus, ceux où la vie respire sans même se soucier de survivre, les temps où la nature sourit et le corps s’étire.

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