Petit Johan sur fond vert…
Depuis quelques jours déjà, mon cousin a débarqué avec sa chérie et leur adorable marmouset. Les deux semaines qu’ils vont passer sur Lam se sont organisées en dernière minute, et nous avons beaucoup de plaisir à les recevoir ainsi. Surtout, les soirées sont l’occasion de conversations à rallonge où nous évoquons souvenirs et détails sur la vie de la famille que nous avons laissée derrière nous lorsque nous avons quitté la France pour partir au Québec. On se raconte notre quotidien, nos projets, nos espoirs et nos déceptions. Toutes ces choses que nous n’aurions sans doute pas eu l’occasion de nous raconter si nous étions restés dans le même pays.
Lorsque nous sommes partis de France il y a 12 ans, nous avons Ben et moi laissé derrière nous une famille étendue, avec une profusion de frères, de soeurs, de cousins et de cousines, d’oncles, de tantes… Et avant de partir, lorsque nous évoquions notre projet d’émigration, nombre de gens s’interrogeaient en nous écoutant sur leur propre capacité à gérer ainsi la distance avec les personnes qui leur étaient chères. La grande majorité finissait par conclure que non, décidément, s’éloigner à dessein des proches était une mission impossible! Ces attaches leur paraissaient tellement indispensables qu’ils ne pouvaient envisager de les faire évoluer. À l’inverse, Ben et moi avions confiance dans notre capacité à étirer l’élastique familial et amical au-delà de l’Atlantique, sans que la relation y perde trop de saveur. Le résultat nous a doublement étonnés.
D’emblée, les relations d’amitié que nous avions en France ont pris une tournure assez surprenante. Certaines personnes dont nous pensions être proches ont rapidement mis un terme à la relation, faute de se nourrir de contacts réguliers. La distance fut pour elles un obstacle majeur à l’entretien d’une amitié qui se nourrissait presque exclusivement de moments partagés. Loin des yeux, loin du coeur, semblait-il. Pour blessante que puisse être l’expérience, nous en avons pris notre parti. Car on pourrait apparenter un départ comme l’émigration à un deuil à faire, et tout le monde n’est pas également équipé pour digérer la chose avec aisance… D’autres amis, ou plutôt connaissances, nous avaient vaguement tapé dans l’oeil avant notre départ. Et curieusement, ce sont parfois ceux-là avec lesquels nous sommes restés en contact. Enfin, nous avons gardé des liens proches avec quelques amis de longue date, que nous ne voyions finalement pas très souvent en France, mais qui se sont avérés extrèmement fidèles au fil des ans, malgré des contacts espacés dans le temps.
Du côté de la famille, la distance a fait intervenir là aussi des données nouvelles qui ont changé le paysage affectif. Certains membres de la famille ont fait le voyage jusqu’à Montréal dans les premières années pour nous voir. La relation s’en est trouvée parfois plus distendue, car en vivant ensemble, on se montre alors des côtés que l’on peut moins facilement contrôler que lors de ces réunions de famille où chacun porte un masque opaque autant qu’épais! Et il n’est jamais simple de ternir le vernis composé dans les familles par l’épreuve du quotidien!
Pour autant, le plus souvent, ce sont les bonnes surprises qui ont été au rendez-vous. Car le fait de se retrouver dans un contexte nouveau a des implications immenses sur un lien de sang. Nous avons ainsi constaté avec bonheur que vivre avec des personnes que l’on croyait connaître pouvait reconstruire une relation jusque là limitée par les codes et des rites familiaux ancestraux! Nous avions alors des rencontres joyeusement improvisées où les codes étaient inventés au fil du temps passé ensemble, sans avoir le lourd plomb du passé familial à assumer à chaque seconde. S’ensuivait alors des découvertes heureuses sur les personnes qui, toutes fraîches de cette libération outre-atlantique, se révélaient dans leur véritable caractère. Et il s’est avéré souvent que ces déshabillages intempestifs nous rapprochaient énormément. Ainsi, nous avions le terreau commun d’une histoire partagée, de valeurs semblables, conjugué à des moments inédits hors du cocon familial. De cette famille non choisie, on s’est fait des amis. À commencer par mes parents. Mes parents sont ainsi devenus mes amis parmi les plus chers, grâce à cette distance voulue. Un dommage collatéral aussi peu anticipé qu’accueilli avec bonheur. On apprend à se connaître, à se reconnaître, et tout est neuf, libéré. On peut même plus facilement se montrer naturel, avec défauts et qualités saillants sur cette façade soudain plus franche, sans crainte de se voir rejeter. Merveilleux kilomètres qui déhabillent et ornent des relations anciennes.
Alors oui, c’est une joie réelle de faire connaissance avec mon cousin, ma nouvelle cousine et leur petit bout de chou. Et de partager avec eux ce qu’ils suivent sur le blog et que nous vivons au quotidien. Décidément, les éloignements, loin d’appauvrir les échanges, peuvent être une occasion unique de les rendre plus féconds et profonds. Mais comme dans toute chose, il s’agit de faire le choix de les vivre comme tels. C’est bien notre intention en tout cas…
Eh oui, la distance est un beau révélateur de belles relations. Enjoy la Martinique et prenez soin de nos frère/belle-soeur/neveu. On vous embrasse très fort!! AL
Bravo et Merci
Je vous embrasse, ambrassez Hélène, Fred et Yohan
Continuez à vivre autant
eh oui, fidèles lecteurs, nous sommes sur le bateau avec vous. Franchement j’ai eu un peu les nerfs en pelote avec Théo sur le bateau avant que ne jetiez l’ancre à Sainte Anne, des vagues comme ça, ça me rend malade … C’est là qu’on voit le côté psycho de la chose … !! je suis au bureau devant mon PC et pourtant ça tangue !!!
En tout cas, pour revenir à ce que tu dis sur les relations, Fanny-Virginie, je confirme que je suis sans doute plus proche de vous, que si vous étiez restés à La Défense (en grande partie, il faut le reconnaitre, grâce à votre blog!). Le jour où vous posez un pied sur notre sol, et qu’on se voit en vrai, en fait, j’aurai l’impression de vous avoir quitté la veille. Mais pour que l’inverse soit vrai, il faudrait que je te donne un peu plus de nouvelles de nos mers et de nos vagues à nous, chose que je ne fais pas … Il risque d’y avoir un décallage ! Le truc, c’est que j’ai l’impression de n’avoir rien d’intéressant à vous raconter, comparé à tout ce que vous vivez d’intéressant dans le cadre de votre aventure familiale … Ah la la, ce n’est pas simple ! Je vais essayer de t’écrire à l’occasion, avec illustrations en photo, ce que nous devenons, afin de rétablir l’équilibre. En tout cas, merci pour vos nouvelles, mais vas-y mollo sur la houle, parceque même avec le gilet de sauvetage, j’ai peur de tomber à la flotte ! Bises ! Anne-Claire KERSUZAN PS : je t’envoie des bises de tes parrain-marraine qui lisent aussi ton blog !
Un message qui parlera a tous les voyageurs 🙂 c’est tres bien écrit! Profitez bien!