Rencontres au fil de l’eau

Brochette de mousses cousins

Nous voici en traversée, partis depuis Marie-Galante ce matin au lever du jour pour rejoindre directement la Martinique. Une dizaine d’heures de traversée, sans doute moins étant donné que nous filons à plus de 7 noeuds. D’ailleurs, nous avons remarqué que nos moyennes de vitesse s’étaient considérablement élevées depuis que nous avons commencé à naviguer sur Lam. Alors que nous ne comptions que des 5 noeuds de vitesse moyenne au départ, nous anticipons désormais des 6-7 et même 8 noeuds! Nous commençons en effet à mieux connaître Lam, ses petites habitudes, et Ben estime que son cours avec le yachtmaster lui a apporté beaucoup. Le problème de ce rythme soutenu, c’est… la pêche!!! Car pour qu’un poisson soit intéressé par notre ligne avec ces vitesses là, c’est qu’il descend directement d’une famille de Mc Gyver version aquatique, ou alors c’est qu’il s’agit d’un ancien athlète des JO sous marins! Autre possibilité, nous avons affaire à des poissons intellectuels qui, du bout de leurs nageoires, jugent qu’un poulpe qui nage à 7 noeuds est d’une espèce supersonique un peu trop rapide pour être honnête, ce qui expliquerait pourquoi la ligne n’attrape rien depuis quelques semaines…

 

Assise au pied de mat, je goûte à un sentiment de liberté et à une impression de flottement propres à la navigation. Je me sens terriblement privilégiée de pouvoir vivre de tels moments suspendus dans le temps, les pieds balants, à considérer les reflets dorés du soleil sur la mer qui s’étale à perte de vue. Je sens la chaleur du soleil sur mes bras, mes jambes et mon visage. Le bruit des vagues qui se brisent sur l’étrave fait une musique agréable. Homme libre, toujours tu chériras la mer, écrivait Baudelaire. Il avait tellement raison… Nous longeons les côtes de la Dominique, île verdoyante et magnifique dont les montagnes font des ombres douces sur le paysage vallonné. Pour une fois, vu que la mer est calme (tout juste une houle régulière de 2 mètres, ce qui n’est pas grand chose), nous passons au vent de l’île. D’habitude, nous préférons passer sous le vent des côtes que nous longeons, pour éviter la houle de l’océan. Mais aujourd’hui, temps calme, nous profitons du bon vent et filons à toute vitesse sur l’eau.

En même temps, on profite des odeurs de pain chaud qui commencent à envahir le carré. Laé et moi avons confectionné un pain fourré au raisin qui ne devrait pas être horrible… Le pain lève presque aussi bien, la mie est ferme et délicieuse, et les membres d’équipage ont toujours du mal à se retenir de tout dévorer d’une traite! Dommage pour eux, nous ne pourrons pas en faire profiter l’équipage de ce bateau de l’UCPA rencontré sur un quai de marina à Pointe à Pitre. Nous les avons retrouvés par hasard à Marie Galante hier soir avec beaucoup de plaisir, et avons bu un coup avec eux (qu’ils nous ont d’ailleurs gentiment offert, ils tenaient à ce que je le précise!!!) en fin d’après-midi. Une équipe de personnes qui ne se connaissaient pas du tout au départ, et dont l’harmonie me frappe, tant chacun semble avoir pris sa place dans le groupe. Ce phénomène heureux me paraît hautement improbable, tant ces stages UCPA peuvent rassembler des personnes qui n’ont rien à voir entre elles. Et pourtant la sauce a si bien pris entre eux qu’on dirait qu’ils se connaissent depuis toujours!  En tout cas, nous les avons quittés à regret et leur souhaitons une fin de séjour magnifique.

Mais cette petite note sur l’harmonie me ramène à nos dernières semaines avec mon cousin Fred, sa blonde Hélène et leur mousse Johan. Car dès leur arrivée, la sauce a pris. Nous qui étions tous les 5 fatigués et un peu tendus, nous avons immédiatement perçu leur énergie et l’ambiance a changé du tout au tout. C’est quelque chose qui m’a toujours fascinée, de sentir l’énergie des autres. On se rend compte que l’on est viscéralement attiré ou rebuté par certaines personnes, sans savoir toujours mettre le doigt sur des causes rationnelles. Il arrive qu’on sente le message, qui peut aller jusqu’à se traduire physiquement. Dans mon cas, si une personne me met mal à l’aise, mon ventre va former un noeud bien serré et j’aurai un comportement d’évitement inconscient. Il se peut aussi que je choisisse d’ignorer ces signaux et de passer outre. Mais l’instinct a souvent raison, et j’ai souvent constaté qu’il était sage de tenir compte de ses appels. En yoga, on appelle cela le prana, l’énergie. Le prana, on le trouve dans l’air, dans la nourriture, dans la lumière du soleil… Mais chacun a une énergie qui lui est propre, et un prana qui lui ressemble. À s’entourer de personnes dont l’énergie est compatible avec la nôtre, on en ressent vite les effets positifs. À l’inverse, quand on fait le choix (conscient ou non d’ailleurs) de côtoyer majoritairement des personnes dont le niveau d’énergie est bas ou qui aspire notre énergie à grande vitesse, on se trouve vite à court!

 

Dans le cas de Fred et Hélène, la sauce a pris d’emblée. Même si la vie en mer pose des contraintes non négligeables dans le quotidien, ce qui ne convient pas à tout le monde, nous avons vécu pendant deux semaines en bonne intelligence. Et au-delà de cela, nous avons pu partager des moments de complicité et d’une intimité aussi rares que précieux. L’amitié s’est soudée ainsi, en dépit du lien familial qui aurait dû prévaloir et qui, finalement, s’est effacé devant cette affinité. Nous n’avions plus besoin de nous définir comme cousins, nous sommes devenus des amis! Nous les avons eux aussi quittés à regret et les retrouverons avec bonheur lors de notre retour en France, en juin prochain.

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