
Nos équipiers, Hélène et David, avec le capitaine le soir du gueuleton qu’ils ont organisé pour nous remercier à l’île de Ré
Prenez un vieux rêve, tout sec et racorni. Un rêve que vous auriez gardé sous une couverture bien épaisse, durant des années. Avant même de débuter vos études. Ce rêve là, vous l’auriez un peu abandonné sous des couches de doutes, de confiance effritée, de certitudes un peu mal placées… Mais le rêve, lui, ne se fait pas la malle. Pire, il choisit de prendre ses quartiers dans un coin de votre cœur, le plus discret et éloigné. Mais il est là. Imaginez qu’un jour, par le hasard d’une rencontre sur une plage des Tobago Cayes, ce rêve soulève doucement la couverture qui le gardait caché. Qu’il lui prenne l’envie de se manifester de nouveau, après quelques tentatives ratées par le passé. Mettons que ce rêve tenace, il en vienne à prendre toute la place. Vous, vous commencez à y croire, et on ne sait pas trop pourquoi ni comment. Vous savez que vous n’avez plus d’autre choix que de le laisser être, respirer. Alors vous le sortez et même, mieux, vous l’exhibez. Pas à tout le monde. Non, il est encore bien trop timide pour ça. Mais vous en montrez le bout des couleurs à votre petite famille. Histoire qu’elle se fasse une idée. Qu’elle fasse connaissance avec cette petite bête curieuse que vous portez depuis si longtemps.
Cette année sur l’eau, c’était le temps. Le rêve est sorti et il a voulu se faire entendre. Alors Ben s’est mis à respirer différemment. Il s’est remis à croire à ce qu’il avait dans le cœur, il y a plus de 20 ans… Il a tout prévu, tout mis en place, tout négocié. Depuis l’été dernier, il nous a embarqué avec lui dans ce bateau tout neuf qui n’existait que dans sa tête. Le défi, tout simple, m’a estomaquée et pas du tout étonnée. Il s’agissait de faire médecine, à 40 ans passés. Nous y voilà. Dans la fièvre, nous avons préparé son dossier pour une admission en 3ème année. Car la France garde quelques belles surprises à ceux qui reviennent la voir : les passerelles permettent à certains gradués de quelques écoles d’entrer sur dossier en 2ème ou en 3ème année. C’était le signe que le petit rêve attendait. On a sauté à l’eau. Et me revient l’adage de Julia Cameron : « Saute, et le filet apparaîtra ». Il est apparu. Car le dossier envoyé a été accepté. Et lundi dernier, c’est à l’oral que Ben défendait ce petit rêve obstiné. Hier matin, nous avons su que ça fonctionnait. Désormais, la vie de la famille va être bouleversée : Ben va pouvoir réaliser son rêve, et on vient vivre en France. Voilà ce fameux projet que nous préparions en douce, et que peu de personnes dans notre entourage connaissaient.
Il paraît qu’on a qu’une vie. Quant à moi, c’est sans doute la 3ème qui débute depuis peu… C’était tout de même incroyable, hier matin, d’attendre. De se dire que la fin de notre existence se jouait dans les minutes qui allaient suivre. Je ne sais pas si cela vous est déjà arrivé. Cette idée que la vie telle qu’on la connaît va connaître un changement radical et que rien (ou presque) de ce que vous connaissiez ne pourra vous servir de repère. Cela me rappelle ce livre d’une journaliste américaine qui avait perdu son mari, décédé devant elle d’une crise cardiaque. En quelques mots, elle écrivait ce désarroi de la vie qui change brusquement. Un peu à la manière de ces personnes qui reçoivent un diagnostic terrible. Le choc est alors parfois vécu comme un instant qui s’étire sans jamais sembler avoir de fin. Comme si une vie ne suffirait pas à comprendre, à digérer. J’ai d’ailleurs eu ce genre de nouvelle à intégrer aujourd’hui à propos d’une personne qui m’est chère, comme un rappel de la fragilité inexorable de l’existence. J’envoie tout mon amour à cette personne, et je lui souhaite toute la joie possible à travers ce qu’elle aura à vivre. Car on peut trouver la joie dans toutes les choses, c’est ce qui en fait la lumière.
En tout cas, la vie a donné sa réponse, et nous changerons avec elle. Déjà, nous avons mis pied à terre. La France est pour nous devenue un pays étranger, après 13 ans d’absence… C’est comme recevoir un cadeau un peu perfectionné, sans avoir le mode d’emploi. Il nous faut réapprendre, tester, demander. C’est un peu déstabilisant, mais c’est marrant aussi. Surtout, nous expérimentons par nous-mêmes ce qu’on nous a dit de la France, surtout ces derniers mois où, sur l’eau, nous avons rencontré beaucoup de français. Et la surprise est de taille. On nous avait mis en garde, on nous avait déconseillé souvent, prévenu encore plus… Jusqu’aux douaniers rencontrés la semaine dernière, qui ne comprenaient pas trop notre choix de revenir en France ! Mais nous sommes tombés sous le charme, comme si c’était la première fois ! Les champs de coquelicots à perte de route, la gentillesse des gens croisés, la beauté de la campagne, et de celle des villes visitées, les odeurs d’ancien senties au fil des églises et des bâtiments historiques (c’est vrai que ça manque cruellement en Amérique !), le goût des petits plats locaux et la fraicheur des fruits, des légumes du marché (encore une denrée rare au Québec, les marchés à ciel ouvert…). On montre fièrement aux enfants ce qui a constitué notre enfance et une partie de notre vie d’adulte. Eux s’étonnent de tout, s’extasient sur les champs de colza, apprécient les curiosités locales et la nourriture. Ils se sont d’ailleurs fait faire un tour gastronomique chez leurs grands-parents, attendu que ma mère leur a concocté une belle part de son répertoire culinaire en quelques semaines ! En visitant le Clos Lucé à Amboise, ils ont aussi pu jouer avec les inventions géniales de Léonard…
Les objectifs des prochaines semaines seront multiples et l’emploi du temps bien chargé. Il s’agit à présent de tout organiser pour que la rentrée se fasse en douceur pour 3 écoliers et un étudiant. On sera donc basés à Tours, ville choisie par Ben pour intégrer la faculté de médecine. Et on prendra le temps de s’installer pour vivre sereinement les dix prochaines années ! Mais il reste que la vie est un éternel recommencement. Qu’on a jamais fini de changer, de bouger, dans sa tête et dans son corps. Tout reste à définir, mais déjà, il y a tant de gens qui se sont manifestés auprès de nous… Tant de présences qui nous font savoir qu’ils pensent à nous, qu’ils nous ouvrent les portes de leur maison (mon oncle et ma tante à Tours, mes parents et les frère et sœurs de Ben ont commencé à le faire !), qu’ils nous apporteront le soutien nécessaire… Ce tissu d’amour et d’amitié me tient chaud, alors que le temps est si incertain en France ces derniers temps… Juste pour cela, merci.
On est super content pour vous, félicitations Ben, on y croyait très fort nous aussi. On fait escale en Jamaïque avant d arriver aux San Blas, des nouvelles dans queues semaines…
Profitez bien de la France, malgré ce qu’en disent les ´aigri? y a encore beaucoup de bonnes choses dans ce beau pays!
On est super content pour vous, félicitations Ben, on y croyait très fort nous aussi. On fait escale en Jamaïque avant d arriver aux San Blas, des nouvelles dans queues semaines…
Profitez bien de la France, malgré ce qu’en disent les ´aigri? y a encore beaucoup de bonnes choses dans ce beau pays!
Benoit,
je suis impressionnée par le fait que tu réalises tes rêves, les uns après les autres, de Fanny au Québec, du Québec à la voile et de la voile à la médecine…Ne baisse jamais les bras car la planète a besoin d’homme comme toi.
je pense souvent à vous 5,
France
Vous ne cesserai jamais de me séduire par votre esprit et votre audace.
Votre approche de la vie est admirable. Vous êtes la preuve vivante que tout est possible et qu’on a les limites en sa vie que l’on s’accorde. Vos enfants ont une chance inouïe d’avoir des parents tels que vous. Vous estes une source d’inspiration et vous connaître est un privilège.
Je vous souhaite beaucoup de succès dans vos projets et tout le bonheur possible.
Affectueusement
Lucie
Lucie, ton message nous porte… Merci pour ces mots touchants, surtout venant d une personne qui aime la vie et lui fait honneur chaque jour avec une grace etonnante…