Aristote aurait dit: « Nous sommes ce que nous faisons de manière répétée. L’excellence n’est donc pas un acte mais une habitude.» Et depuis quelques temps, je médite sur la première partie de cette citation. Il est tard, je devrais être en train de me coucher, mais j’ai envie de vous écrire. Ça me turlupine, cette suite de mots. Nous sommes ce que nous faisons de manière répétée. Je trouve cela terriblement interrogeant. Quoi ! Chaque petit geste de chaque petit jour dit quelque chose de ce que nous sommes. Poursuivons là une réflexion intéressante. Jusqu’à tirer du quotidien les fils de ces petites habitudes. Avec un peu de bol et de patience, on pourra peut-être se faire un tricot ! Que répète-t-on ainsi, d’un saut de 24h à un autre ? Est-ce le geste enfilé à la va-vite pour gagner une petite poignée de secondes jusqu’au bureau ? On zig zag entre les voitures, on passe le feu à l’orange ? Et sait-on seulement pour quoi, pour qui, les gagner, ces minutes, ces secondes ? Est-ce le sourire que l’on tend comme une main à la boulangère ? Ou celui qui vient rafraichir par une journée chaude le clodo que l’on croise immanquablement toujours au même coin de rue ? Est-ce qu’on pourrait désigner aussi les critiques que l’on distribue sans y penser sur les autres, le frère, le collègue, l’enfant ou le conjoint ? Une vieille habitude que l’on garde sans y prendre garde, et que l’on traîne à la manière d’un vieux vêtement dont on peine toujours à se débarrasser, car on l’a toujours connu ? Ces petits boomerangs du quotidien, est-ce que cela peut se résumer à ces routines que l’on a pour soi, une hygiène du déroulement naturel d’une vie qu’on laisse parfois passer sans trop la regarder, ou alors à l’inverse en y prêtant une attention soutenue ? Se souvient-on ainsi d’un minuscule moment passé en solitude avec soi, pour faire la paix le temps de quelques respirations avec un monde qui va trop vite, pour reprendre le souffle d’un flux d’événements qui nous inonde ? Y a-t-il donc dans nos précieuses minutes des échappées pour soi tout seul, au milieu du monde, ou bien n’est-on jamais habité, chaque jour, que par les besoins et les sollicitations des autres ? Comment remplit-on la source intérieure à partir de laquelle tirer ce qui vit en nous, ce qui est créatif et qui demande à bouger ?
La somme de tous ces gestes minuscules effectués à chaque instant de chaque jour nous définirait ainsi mieux qu’un CV ou une photographie. C’est sans doute sur ces instants qu’il faut arrêter l’objectif, pour comprendre mieux qui nous sommes. Cette phrase m’interpelle, et j’en viens à me demander de quoi sont faites mes journées. J’aimerais y trouver de l’amour, du temps ralenti, des sourires, de l’écriture, de la passion. Tout n’y est pas, tout est perfectible. Mais je garde le sens de ce qui doit être, et cela me donne une direction. Et vous, il est dirigé où, votre arc personnel ?